En 2024, la réforme du minimum contributif augmente la pension de 185 000 nouveaux retraités

Études et résultats

N° 1297

Paru le 29/02/2024

Martin Chopard (DREES)
La Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) publie une étude sur le minimum contributif (Mico), le minimum de pension de base des salariés du secteur privé et des indépendants. Renforcé par la réforme des retraites de 2023 (hausse de 100 euros, notamment), ce dispositif vise à relever les pensions qui sont faibles en raison de carrières cotisées sur la base de faibles salaires. L’objectif de cette étude est de détailler l’impact de cette réforme sur les bénéficiaires du Mico, à court et long termes. Plus largement, il s’agit de décrire ces bénéficiaires et de quantifier l’effet redistributif de ce dispositif de solidarité du système de retraite. Les résultats sont obtenus à l’aide du modèle de microsimulation Trajectoire de la DREES, dont le code est diffusé en open source.


Le minimum contributif, à ne pas confondre avec le minimum vieillesse, est conditionné à un départ sans décote

Servi dans les régimes alignés (régime général, y compris indépendants, et régime des salariés agricoles), le minimum contributif (Mico) est accordé dans une logique individuelle et contributive, c’est-à-dire en contrepartie de cotisations acquittées durant la carrière. En cela, il ne doit pas être confondu avec l’allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa), ou minimum vieillesse, un minimum social accordé sous condition de ressources du ménage, à partir de 65 ans. 

Par ailleurs, l’éligibilité au Mico est conditionnée au fait de liquider sa retraite à taux plein, i.e. sans décote (mais cela n’implique pas nécessairement d’avoir validé tous les trimestres requis).

Le montant du Mico dépend de la durée validée : il relève les pensions des assurés aux salaires modestes

De plus, le montant du Mico au niveau duquel la pension peut être relevée est proratisé par la durée effectivement validée au sein des régimes alignés. Une personne ayant réalisé toute sa carrière et ayant tous les trimestres requis dans le secteur privé peut bénéficier d’un Mico plein. Une autre n’ayant validé que la moitié des trimestres ne peut voir sa pension relevée qu’à hauteur d’un demi Mico. Ce dispositif vise ainsi essentiellement les pensions qui sont modestes car cotisées sur la base de salaires faibles.

Des évolutions législatives depuis 1983

Plusieurs modifications importantes ont été effectuées depuis la création du Mico, en 1983, d’abord afin d’augmenter son montant, puis pour de restreindre son périmètre et le cibler vers les plus modestes, ainsi que ceux ayant le plus travaillé. Désormais, le Mico est donc composé d’un montant de base et d’une majoration (également proratisée), octroyée uniquement aux assurés justifiant d’au moins 120 trimestres cotisés. 

En 2012, un plafond de pension tous régimes a été introduit, au-dessus duquel le Mico est écrêté. Cette mesure visait à cibler les retraités les plus modestes, elle a fait fortement diminuer la part de nouveaux retraités bénéficiant du dispositif. 

Un dispositif renforcé à l’occasion de la réforme de 2023

Outre les mesures d’âge et de durée, la réforme des retraites de 2023 a augmenté de 100 euros le montant du Mico, à compter du 1er septembre, à la fois pour les retraités actuels (+100 euros sur la seule majoration) et pour les futurs retraités (+75 euros sur la majoration et +25 euros sur la base). De surcroît, l’indexation du minimum est rendue plus dynamique : le Mico évolue maintenant selon le Smic et non plus l’inflation. Cette mesure a vocation à garantir l’obtention d’une pension égale à 85 % du Smic net à l’issue d’une carrière complète cotisée au Smic dans les régimes alignés. 

En 2024, 185 000 nouveaux retraités voient leur pension augmenter sous l’effet du relèvement

Le modèle Trajectoire permet de simuler la pension moyenne des liquidants des régimes alignés en 2024 de deux façons différentes : avec ou sans les modifications relatives au Mico contenues dans la réforme de 2023. Il ressort que le relèvement de 100 euros accroît la pension de 185 000 nouveaux retraités des régimes alignés, pour un gain de 30 euros en moyenne. 
La part de bénéficiaires du dispositif augmente quant à elle de 4 points de pourcentage par rapport à une situation sans réforme du Mico, pour s’établir à 30 %. Les 26 % d’assurés déjà éligibles au Mico avant réforme bénéficient aussi presque tous de la mesure.

La réforme de 2023 stabilise la part de bénéficiaires du Mico à long terme

En l’absence de réforme du Mico et de changement de son indexation, la proportion de bénéficiaires était supposée décroître de manière progressive, jusqu’à 10 % à l’horizon 2070. L’impact du Mico était ainsi amené à s’éteindre progressivement. Grâce à l’indexation du Mico sur le Smic, cette proportion est stabilisée à long terme, entre 25 % et 30 %, et le gain procuré par le Mico est pérennisé.

Proportion de nouveaux assurés des régimes alignés bénéficiant du minimum contributif (Mico) selon le scénario, par année de liquidation

Le Mico possède un fort pouvoir redistributif, accentué par la réforme

En calculant la pension totale des assurés des régimes alignés de trois manières différentes (en l’absence de Mico, avec Mico hors réforme 2023 et avec Mico réformé en 2023), pour chacun des déciles, il est possible d’apprécier l’impact redistributif du dispositif. Les gains relatifs à la prise en compte du Mico diminuent avec le niveau de pension et sont fortement concentrés sur les trois premiers déciles de pension tous régimes. Ainsi, pour la génération 1975, la prise en compte du Mico rehausse le 1er décile de 23 %. 

Par ailleurs, les montants moyens de Mico servis aux bénéficiaires tendent à augmenter avec le niveau de pension totale, car la proratisation du Mico devient de plus en plus favorable et, de surcroît, davantage de personnes peuvent prétendre à la majoration. Toutefois, en termes relatifs, c’est-à-dire quand on regarde le poids dans la pension totale, c’est bien pour les bénéficiaires les plus modestes que le Mico constitue l’apport le plus important. 

A l’inverse, la proportion de bénéficiaires diminue avec le niveau de pension, jusqu’à atteindre le seuil d’écrêtement, au-delà duquel personne ne peut prétendre au Mico.

Les femmes bénéficient du Mico deux fois plus souvent que les hommes

Avec des salaires de carrière en moyenne plus faibles que ceux des hommes, ce qui induit des salaires de référence (retenus pour calculer la pension) plus modestes, les femmes sont plus nombreuses à bénéficier du dispositif (32 % contre 18 % pour les hommes sur la génération 1975). Elles perçoivent également davantage que les hommes en moyenne (112 euros constants 2023, contre 90 pour les hommes), grâce notamment à une surreprésentation parmi les personnes éligibles à la majoration du Mico.

Grâce au Mico, l’écart de pension moyenne dans les régimes de base du secteur privé entre femmes et hommes se réduit, passant de 16,6 % à 14,5 %.

Trois questions à ...

L’ensemble des simulations ont été réalisées grâce au modèle de microsimulation Trajectoire de la DREES. Ce modèle projette les carrières et départs à la retraite d’un échantillon d’assurés, sur la base de données individuelles, afin de refléter la diversité des situations et comportements possibles. L’éligibilité au Mico et le montant versé sont déterminés lors du calcul de la pension à la liquidation.

Trajectoire permet de connaître en projection, année après année, la situation globale du système de retraite (masses de pensions, effectifs de pensionnés), ainsi que les données individuelles (distribution des âges de départ, montants de pension, durées validées, etc. par sexe, génération, régime, etc).

Ce modèle utilise les deux grandes sources de données interrégimes de la DREES :

  • l’échantillon interrégime de cotisants (EIC), qui recense les droits acquis (trimestres et points) d’un échantillon représentatif d’assurés. Cette source permet de projeter les carrières dans le futur sur la base des transitions et parcours observés, et de simuler les rémunérations associées ;
  • l’échantillon interrégime de retraités (EIR), qui récapitule quant à lui les informations relatives aux pensions (âges, conditions et montants) d’un échantillon représentatif de pensionnés. Cette source permet de modéliser les comportements de départ des assurés et d’en déduire les pensions versées.

Pour en savoir plus

Le modèle de microsimulation Trajectoire de la DREES